Extrait
de " Le livre au Moyen Age " - Presses du CNRS - sous la direction
de Jean Glenisson (Pages 166 et suivantes)
" Si l'usage d'illustrer des textes se transmit des " rotuli
" aux codex, celui de les décorer de lettres ornées puis, vers
le milieu du VIIIème siècle, de lettres historiées, fut une
innovation proprement médiévale.
Cette introduction de l'ornement est à mettre en rapport avec
l'évolution de la pratique de la lecture. Alors que, dans l'Antiquité,
celle-ci était faite à haute voix par des esclaves formés à
cet exercice, dans les premiers siècles du Moyen Age, le possesseur
du livre devint aussi son propre lecteur.
Dès lors, le manuscrit se muât en objet qu'on se plut à enjoliver
: les premières initiales ornées, datées du VIème siècle ( ?)
? placées en tête de pages, quelque soit le mot qui bénéficiait
de leur décor, étaient là pour enrichir l'aspect du livre.
Disposées par la suite en tête des chapitres et des paragraphes,
elles eurent pour objet de souligner l'articulation des textes
et d'en guider la lecture.
Toujours propres à flatter l'œil du lecteur, elles assumaient
la fonction supplémentaire de servir de point de repère. On
ne sera pas étonné que la Bible et les ouvrages liturgiques
constituent la plus grande part de nos textes enluminés.
Fondements de la foi, guides de la piété collective et individuelle,
instrument d'exégèse et de culture, ces livres indispensables
au culte furent toujours produits même dans les époques troublées.
A côté des copies d'antiques, se sont les bibles qui, dans les
scriptoria carolingiens, ont fait l'objet d'un effort iconographique
et d'un déploiement ornemental fastueux.
A l'époque romane, elles furent ornées et illustrées pour glorifier
Dieu et manifester le rayonnement de l'abbaye dès que s'installait
une période de calme et de prospérité. Le moment où le scriptorium
d'un monastère se montre capable d'assurer, outre l'écriture,
l'illustration des textes, coïncide souvent avec celui d'un
essor général, avec la présence, à sa tête, d'un abbé de grande
valeur.
Glossaire :
Codex :
livre formé de feuilles pliées et assemblées en cahiers cousus.
Cahier :
ensemble de bi-folios en nombre variables (généralement de quatre
à six) emboîtés les uns dans les autres et réunis par un fil
de reliure.
Bi-folio : (ou bi-feuillet) :
Feuille de parchemin pliée en deux pour former deux feuillets.
Un Bi-folio extérieur forme le premier et le dernier feuillet
d'un cahier. Un bi-folio intérieur (on dit aussi médian ou central)
est celui sur lequel, au milieu du cahier, passe le fil de couture.
Format :
façon de plier une feuille en deux (in-folio), en quatre (in-quarto)
ou en huit (in-octavo) pour former les feuillets.
Pieds de Mouche :
signe en forme de crochet arrondi, parfois traité de façon décorative,
qui sert à séparer les différents paragraphes d'un texte.
Pitancier :
" officier " (fonctionnaire) d'une abbaye chargée de faire rentrer
les revenus en espèces ou en nature des fondations (anniversaires
ou autres) et d'en assurer la distribution aux religieux qui
s'acquittent des offices demandés par le fondateur, selon le
vœu de celui-ci.
Goliard :
clercs en rupture de ban ; ce sont des poètes du plaisir.
Autographe :
manuscrit écrit de la main même de l'auteur.
Calligraphie :
écriture remarquable par ses qualités esthétiques.
Côté chair :
face du parchemin qui adhérait au muscle de l'animal.
Côté poil :
face du parchemin où la toison de la bête a été rasée.
Scriptorium :
pièce réservée (en particulier dans les monastères) à l'écriture
des livres ; en fait, c'est là que se déroulent toutes les opérations
contribuant à l'achèvement du livre, de la préparation du support
à la décoration et même à la reliure.
Capitulaire :
actes législatifs émanant des Roi de France mérovingiens et
carolingiens.
Queue :
bas du dos du livre.
Tête :
haut du dos du livre". |